lundi 8 février 2010

Jean-Pierre Le Goff


Le cachet de la poste, (feuilles volantes)
Jean-Pierre Le Goff


... Dès lors, il faut que les recherches, que l'on effectue, s'attachent au Kairos, ou Rien, presque rien. Nos actions ne seront pas banales, tout mouvement se proposant une quelconque singularité derrière je ne sais quelle situation banale, tout groupe essayant de concevoir un événement comme non-événement, ou cherchant à fonder système à partir de l'anodin, nous font rire. La banalyse nous fait rire, car elle porte en elle sa propre contradiction. Tout acte, que l'on se propose d'effectuer devant vos yeux, a son importance. Tout acte est important, car, derrière lui, le temps effectue sa ronde, comme une jeune fille entre sur une piste de danse. J'aime la nudité des murs dans les films d'Alain Cavalier, j'aime, davantage encore, enfiler des perles des heures durant et vous montrer leur vol au-dessus de la cathédrale de Strasbourg.
... Il n'y a pas de geste anecdotique, pas de situation anecdotique. Tout se vaut sous le soleil, tout est égal, les grands hommes comme les petits.

Toi qui me lis, apprends que l'événement ne se trouve pas dans les lieux prévus à cet effet, ni dans les livres, ni dans les cinémas, ni dans les galeries, ni dans les temples. Le Kairos, ce petit dieu, n'a pas de temple, aucun lieu, aucune topique ne permet de l'encadrer, mais il peut être tenté.

Ouvre l'œil, reconnais la circonstance avec l'acte propitiatoire et construis-moi un autel, comme l'enfant bâtit un nid pour l'oiseau blessé qu'il veut soigner.

Je t'aime.

Aujourd'hui, je vais te parler du poids de l'âme.
Demain, je te dirai comment mesurer la distance entre ton corps et ton esprit, en suivant les lois de Weber et Fechner.

A bientôt.

A bientôt ou adieu.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Intéressant et drôle comme référence, la notion de Kairos, me fait penser encore une fois au Yi King, traduit par R. Wilhem qui commente par exemple dans l’hexagramme 1, "k’ien", le Créateur, cet Instant saisissable seulement par une espèce de connaissance intuitive : « Parce qu’il [l’homme] voit avec une grand clarté les causes premières et les effets, il accomplit en temps opportun les six degrés et s’élève sur eux vers le ciel en temps opportun, comme sur six dragons…et le temps n’est plus un obstacle, mais le moyen qui permet la réalisation du possible ».
La plupart du temps, je passe à côté et les heures glissent à mon insu...

Lemoine a dit…

Oui, c'est ça. Il faudrait que je me penche plus précisément sur le I King, mais le Kairos, c'est ce que l'on attrape au gré du hasard. C'est aussi le coup de foudre, le soufre et l'illumination. La différence entre le petit dieu et les bâtons chinois, c'est que le petit dieu peut être tenté intuitivement, l'on peut avoir une certaine maîtrise de son destin et c'est plus amusant que le livre des transformations. Généralement, les occidentaux utilisent le I ching pour interpréter leur destin , pour la glose et non pour changer leur vie ; ainsi de Jung ou de Vaneigem. John Cage est plus proche du I Ching, à mon sens, que ces deux-là. Mais, bon... facile à dire...