mardi 26 avril 2011

Mot-dire

Cubomanie, Ghérasim Luca



Con

Conne

Connard

Connasse

Couillon

Casser les couilles

Casser les noix

Casser les claouis

Casser les burnes

Tête de con

Tête de nœud

Tête de cul

Faux-cul

Faux-derche

Lèche-cul

Ça va chier

Tu me fais chier

Chienlit

Merde

Merdeux

Tu m’emmerdes

Avoir les miches à zéro

Je te pisse au cul

Et mon cul ?

Tire au cul

Tire au flanc

Enculé

Empaffé

Fiotte

Tu l’as dans le cul

Tu l’as dans le baba

Va te faire foutre

Pédé

Pédale

Tapette

Tante

Fiotte

Pute

Salope

Gouine

Lesbienne

On est foutus

Un foutoir

Un bordel

Un branleur

Un masturbé intellectuel

Une diarrhée verbale

Accouche

Vide ton sac

Se les vider

Sale métèque

Nègre

Arabe

Noir

Jaune

Gris

Il est gris

Il est grillé

Il n’est pas clair

Il a les mains sales

Ça sent la merde

Ça fout la merde

Ça fout la gerbe

Gerber

Le petit Jésus

Le petit poisson

Le sexe d’un ange

Les gros mots

Les petits mots

Les gros noms

Les petits noms

Le surnom du sexe de ta femme,

le surnom du sexe de ton homme,

tout ce qu’on ne dit pas en société,

ce qu’on a honte de penser,

de susurrer ou proférer,

ce qu’on exècre ou idolâtre.


− Inversion des noms :

les petits deviennent des gros

et les gros, des petits noms.


Nomme les parties anatomiques du corps

de ta maîtresse ou de ton amant.

Quelques soient tes désirs

pour l’un ou l’autre sexe,

baptise les détails du corps aimé,

traverse ta propre honte en la matière,

transforme des détails physiques en fétiches.


Invente de nouveaux sadhanas :

du temple du corps aimé

paraîtront de nouveaux dieux.

Aucune voie n’est essentielle à ce sujet,

toutes sont bonnes et justes.


Les petits noms, les noms d’oiseau,

lorsque chaque partie du corps humain

choisira pour elle-même

son propre destin.


Je t’aime ;

je parle à ton œil et je lui dis, Je t’aime,

ton œil me comprend par lui-même,

il me ressent et cligne sa paupière.


Je te hais ; je te donne des noms d’oiseaux

que tu n’acceptes pas.

Tu veux me les retourner :

− contre sort.

Tu n’admets pas que l’on se moque de toi ;

se moquer de ton nom, selon toi,

c’est se moquer de toi.

Tu m’insultes à ton tour

et tu découvres que je ne me formalise pas.

Tu attaques quelqu’un qui ne croit plus

que son nom soit sa personne,

qui se joue de son nom et de sa personne,

qui se joue du nom et de la personne.


C’est le travail de poésie, sur mon corps, sur le corps, sur la peau,

hors les pages, hors les murs, hors les livres, hors les villes.

C’est le travail de poésie : une expérience à méditer

à loisir sur le corps aimé,

lorsque la chair se fait paysage puis destin.


Écriture de nouveaux tantras,

hors les livres et les rites,

sur la peau de qui tu aimes.

Écriture de nouveaux mondes sur ta peau,

aussi valables et légitimes

que les cosmologies actuelles des physiciens.


Cuisse de Jupiter des poètes et des physiciens actuels :

l’origine du monde de Courbet et le paradoxe du ciel en feu.


Monde des poètes, des fous littéraires et des physiciens :

ouverture des vies minuscules inventant des mondes

et s’y pliant pour leur propre compte.


Aujourd’hui, chaque homme est le dieu païen Momus

qui évaluait, selon Giordano Bruno, l’ordre du monde

à l’aune des lois de la physique newtonienne ;

chaque vie, chaque monde est une chimère.


Amour & Utopie


samedi 2 avril 2011

Station 11, dans Télérama

Le studio d'Arte Radio, en décembre

Dans le Télérama de cette semaine, une bonne critique de ma pièce, Station 11, sur Arte Radio :

"Assez peu habitée, la planète fiction radiophonique abrite des auteurs essentiellement estampillés France Culture ou Arte Radio. Si cette dernière produit moins que sa grande consoeur, elle explore d'autres techniques, lieux ou univers, et teste des dramaturgies parfois extravagantes. Là, il s'agit de l'histoire de Christelle, une étudiante en sociologie séquestrée par un junkie pour avoir mené une croisade contre la toxicomanie. "Oui, j'ai dit que la drogue n'avait pas d'autre but que de soustraire des individus aux réalités quotidiennes et que le mieux était de ne jamais commencer.", est-elle contrainte d'avouer. "Oui, j'ai posé un crâne sur la table et déclaré que la vie était courte, fragile, et qu'il s'agissait de la connaître et de la vivre du mieux que l'on pouvait. " En signe de représailles, non seulement la jeune fille est ligotée, mais son agresseur entreprend de lui faire goûter à l'héroïne.

Bruitages étouffés, souffles courts, chuchotements. Un rien pervers, le texte de Bruno Lemoine est appuyé par la concrète et discrète musique d'Anton Mobin. Soumise, Christelle répète les mots qu'on lui dit... "Pourquoi ne serais-tu pas le Christ en croix ou une araignée dans sa toile. Non, les drogués ne sont pas des saints et des criminels." La scène se déroule en sous-sol, dans la violence et la peur. Et on y croit, quand, soudain... Si Bruno Lemoine cherchait à déstabiliser les auditeurs, il y a réussi."

Anne-Marie Gustave


Station 11, ici :
http://www.arteradio.com/son/615901/Station_11