mercredi 7 décembre 2011

Herméneutique



Revue Nioques



Dans le dernier numéro de la revue Nioques, au milieu de textes incroyables, Herméneutique, un texte de moi extrait d'un chantier littéraire intitulé pour le moment Bildungsroman et qui me donne bien du fil à retordre... Vous pourrez juger par vous-même...

*




Toc, toc, toc, il y a quelqu’un ?...
-
-
-
-
-
-





Herméneutique



/Notre entretien a été mené sur un forum d’ « Odinistes ». Il s’agit d’un forum de discussions en ligne traitant des fois païennes nordiques et se référant au culte du dieu Odin. Une majorité des membres du forum, dont les contributeurs les plus prolifiques, se disaient des « païens identitaires ».

L’extrait qui suit est une réponse en « message privé » à une question que nous avions adressée à tous les membres du forum. Nous reproduisons, à la suite, un morceau de cet entretien avec un « païen identitaire » :


« R. a écrit :

Sois le bienvenu ici^^

Qu’est-ce qui t’a amené parmi nous ?


Nous :

J Sacrément vivant ce forum !

À vrai dire, pour un travail de sociologie que je suis en train de mener. J’ai parcouru de nombreux forums, dont certains avaient des liens vers celui-ci. Ce qui m’intéresse, ce sont les questions d’identité et d’appartenance, et leur émergence sur Internet… »


Nous allons maintenant chercher à interpréter ce message, afin de mettre en évidence l’identité de notre interlocuteur.


Analyse rapide du message sur Internet :


Soit l’énoncé -1- :

« Sois le bienvenu ici^^ »

L’interaction s’ouvre avec un souhait sous la forme de l’impératif. L’utilisation de l’impératif met le locuteur en position de celui qui a un pouvoir. En l’occurrence, celui de permettre à son auditeur d’être reçu. L’auditeur tient donc le rôle de hôte invité, et le locuteur signifie ainsi son hospitalité. « Ici » précise une localité pour le pouvoir du locuteur, et implique que l’hospitalité et son pouvoir ne valent pas forcément partout, qu’ils ont potentiellement des smiley limites. Le sourire sous forme de « ^^ » renforce la démonstration de l’hospitalité par un signe amiable.

« Sois le bienvenu ici^^

Qu’est-ce qui t’a amené parmi nous ? »

L’auditeur a été amené ici par quelque chose, il ne va pas de soi qu’il s’y trouve. Quelle est la chose qui a amené le chercheur ? Cela pourrait être une raison, ayant motivé la venue, ou un moyen qui a servi en quelque sorte de véhicule pour arriver là. Avec la distinction entre toi et nous, la distribution des rôles d’hôtes est répétée et renforcée, et le nous est donc un ensemble dont il ne va pas de soi qu’on y soit amené.

« J Sacrément vivant ce forum ! »

Ici commence la réponse de l’enquêteur au salut de son interlocuteur. La réplique débute par un sourire symbolisé, suivi par une remarque familière soulignant une caractéristique attribuée à ce forum,

« J Sacrément vivant ce forum ! »

signifie que nous sommes très contents d’être ici au milieu de toute cette soupe et qu’il nous faudra sacrément du courage pour l’analyser comme il se doit. Le fait que cette observation (annoncée plus tôt avec la déclaration de vouloir s’enquérir à propos du groupe) soit positive, prend sens en tant que réponse rassurante à la question posée par R./






Comme producteur de « propagande » − cet ensemble de textes, de sons et d’images qui participe à maintenir en l’état l’ordre social −, le métier d’éditeur tient une position paradoxale par bien des aspects. D’un côté, sa marque (le nom de la maison d’édition) est bien visible sur le produit « livre » ; de l’autre, tout un chacun est en droit de se demander ce qu’il fait.

L’éditeur















… Toc, toc, toc, il y a quelqu’un ?


_____________________] | [_____________________

(Seuil)

|

Moi :

« J Sacrément vivante, cette maison ! Vous êtes éditeur ? »

− Hors contexte, la phrase peut se lire : Je suis ravi et content, et content et heureux, d’être ici parmi vous, mais l’ironie transparaît : mélange doux-amer.

− Hors contexte, la phrase peut se lire : j’ai bien lu le catalogue de votre maison d’édition et je connais, j’aime, j’aime et je connais la plupart de vos auteurs et je souhaiterais les rencontrer : j’aime, je vous aime !…


/Fictions, cheveux & peaux mortes déposés dans des feuillets, marques d’onychophagie, le rire fuse !



_____________________] | [___________________

(Seuil)

|

/Essayons :

Je suis tout à fait en phase avec la ligne de la maison, le concept. Je suis la ligne, j’arpente, oui, j’arpente et, en arpentant, je sais tout ce qu’il faut savoir. Je frappe donc à votre porte en homme averti.


/JE SAIS


/Ongles, cheveux & peaux mortes : indices

à prélever sur un tapis blanc pour maudire.



/− Eh ! comment ce nom vous appartient-il ?

– Parce que j’en suis l’auteur ; mais cela n’empêche pas que je ne sois aussi Casanova.

– Comment peut-on être l’auteur d’un nom ?

– L’alphabet est la propriété de tout le monde ; c’est incontestable. J’ai pris huit lettres et je les ai combinées de façon à produire le mot Seingalt. Ce mot ainsi formé m’a plu et je l’ai adopté pour mon appellatif, avec la ferme persuasion que, personne ne l’ayant porté avant moi, personne n’a le droit de me le contester, et bien moins encore de le porter sans mon consentement.

Le Chevalier de Seingalt/


CASANOVA = LE CHEVALIER DE SEINGALT


/Un sorcier prélève fictions et peaux mortes sur un feuillet blanc appartenant à un maître de maison pour le maudire.


_________________] | [__________________________

(Seuil)

|

/Je suis initié, je sais, je suis en phase. Et, puisque je sais, puisque je suis en phase avec la ligne de la maison d’édition, je peux donc parler sans crainte ici même :


… Ici

…Là

… & là.


/Bruno LemoineSee full size image aime cette phrase de l’éditeur Christian Bourgois, à propos de la révélation qu’il a eue en découvrant Genet : « Il avait une écriture. »


/Je suis en phase, je vous aime, j’aime, je suis la ligne.


/En écho, cette phrase de Yasser Arafat, à propos de Genet en Palestine : « Il avait une écriture. »

/J’aime !


/Un sorcier prélève ongles, peaux mortes et cheveux sur un tapis blanc, pour maudire.


/ Bruno LemoineSee full size image dit,

Je suis Genet, si tant est qu’il s’agisse de dire un nom pour ne plus croire au destin ni en un destin.









_______________________________________________

/Toc, toc, toc…



/L’acousmate entendant Pythagore derrière un rideau au moment de sa leçon, l’initié voyant Pythagore proférer : blanc de l’œil & blanc de la page.



/− De honte, pouffa Ramón. Ah, Señora Caterina, pourquoi, de honte ? C’est quelque chose que nous devons faire. Il doit y avoir des manifestations. Nous devons en revenir à la vision du cosmos vivant : nous le devons. L’antique Pan est en nous et ne peut être désavoué. De sang-froid et de sang-chaud, nous devons opérer ce changement. L’homme est ainsi fait. J’accepte en mon âme les devoirs de Pan le très ancien et de mon moi le plus neuf. Une fois que l’homme a rallié à lui toute son âme et tiré une conclusion, le temps n’est plus des alternatives. Je dois. Voilà tout. Je suis le Premier Homme de Quetzalcóatl. Je suis le Quetzalcóatl en personne, si vous voulez. Manifestation, et homme. Je m’accepte entier, puis j’accomplis la destinée. Car enfin, que puis-je faire d’autre ?

D.H. Lawrence/


D.H. LAWRENCE = Quetzalcóatl, le serpent à plumes








Autrement dit, la diffusion des « bonnes » idées et des analyses « justes » suffit-elle ? Que valent des idées et des analyses qui ne sont pas mises en pratique par leurs premiers promoteurs ? Réaliser déjà, un peu, les fins qu’on se raconte dans les moyens qu’on se donne…

L’éditeur





Toc, toc, toc, il y a quelqu’un ?








Herméneutique



/ Notre entretien a été mené par mails avec une écrivain, Nathalie Quintane, qui est membre du comité de lecture de Nioques, une revue de poésie contemporaine, pour un texte que nous désirions publier. L’extrait qui suit est un dialogue en « message privé », qui répond à la requête que nous adressions à Quintane d’accueillir notre texte.

« L. a écrit :

Bonjour madame Quintane,

Je ne sais pas si vous êtes toujours au comité de lecture de la revue Nioques.

« Q. a écrit :

eh oui

« L. a écrit :

Je ne sais même pas si vous vous rappelez de moi J

« Q. a écrit :

oh oui

« L. a écrit :

Je vous envoie tout de même ce texte ; vous lui trouverez peut-être un intérêt.

« Q. a écrit :

merci !

je le fais passer à gleize et noura wedell – on doit s’occuper bientôt du prochain n°.






Dans l’un des domaines par excellence du déni d’argent qu’est (au moins dans ce pays) le monde de la culture en général, et de l’édition en particulier, il n’en reste pas moins qu’éditeurs, revuistes et auteurs partagent (au moins implicitement) le projet commun de vendre autant de livres que possible. Ce qui n’est pas suffisant pour être longtemps d’accord.

L’éditeur






/ Analyse rapide du message de Quintane :

Soit l’énoncé -1-

« eh oui »

L’interaction embraye de façon directe et spontanée avec l’interjection « eh », écrite en début de phrase et sans majuscule, ce qui est une façon de rendre l’écrit proche de l’oral. Une telle procédure énonciative, qui est monnaie courante sur Internet, a pour charge d’imiter une situation de communication en face à face. « eh », en tant qu’interjection, dans « eh oui », « eh bien » ou « eh Albert ! », en plus de sa fonction conative, est une façon souple de contextualiser, à peu de frais, un dialogue engagé.

Soit l’énoncé -2-

« oh oui»,

en tant que réponse, répétition et réplique de notre deuxième occurrence envoyée à Quintane, « oh oui », donc, de Quintane, après « eh oui », peut signaler un sous-entendu : l’idée sous-jacente que rien n’est joué d’avance, même si le dialogue est amorcé.



/D. H. Lawrence a écrit dans Le serpent à plumes:

Ramón se leva. Se retournant vers lui, les Hommes de Quetzalcóatl levèrent tous ensemble leur bras droit nu, imitant le geste de la statue. Ramón leva le bras, et sa couverture glissa jusqu’à son épaule, laissant voir son flanc nu et sa ceinture bleue.

− Que tous les hommes saluent Quetzalcóatl ! ordonna une voix claire !/

D.H. LAWRENCE = QUETZALCÓATL, LE SERPENT À PLUMES

CASANOVA = LE CHEVALIER DE SEINGALT



/Le sorcier pour l’incrédule, l’ouanga vaudou pour le touriste aux Antilles, le poème dont l’invocation est perdue.






/Bruno LemoineSee full size image dit,

Faute des structures sociales nécessaires, je suis comme Casanova ou D.H. Lawrence. Je suis quiconque écrit et se fait un roman de la vie plutôt que de pouvoir faire de sa vie un roman. J’en suis réduit à imaginer et à raconter, dans des histoires, des vies de personnages plutôt qu’à simplement les vivre. Je suis obligé, à cause de nos principes et de nos mœurs, à me servir de l’écriture comme d’un exutoire, plutôt que d’être concrètement l’Homo ludens : l’homme qui joue. Contraint, en somme, à être dissocié et souffrant, au fil des pages écrites, de cette dissociation des vies en moi, qui ne peuvent être réalisées concrètement, sous peine d’être enfermé.

Je suis le chevalier de Seingalt, je suis le Quetzalcóatl Vivant, firent, solennelles et impassibles, les voix de Casanova et de D. H. Lawrence, hors chôra, c’est-à-dire hors d’une communauté humaine pour les entendre. Je suis Jean-Jacques, dit Rousseau, je suis Champavert, dit Petrus Borel, je suis dieu, dit Nijinski, je suis George Brecht, dit George Ellis MacDiarmid, je suis Anarchasis Cloots, dit Beuys, je suis Orphan, dit Yves Adrien, je suis Amundsen, dit Céline Faure, etc.






/David Gerber, un sociologue suisse, a écrit à R., webmaster du site Les fils d’Odin :

… J’ai parcouru de nombreux forums dont certains avaient des liens vers celui-ci. Ce qui m’intéresse, ce sont les questions d’identité et leur émergence sur Internet.

J'aimerais beaucoup parler - par PM, voire msn ou autre - à une personne qui se considérerait Païen Identitaire pour qu'il (elle?) m'explique sa vision et son expérience d'internaute païen... donc si quelqu'un a un peu de temps, lancez-moi un pm, j'en serais très reconnaissant!

R., webmaster du site Les fils d’Odin a répondu à David Gerber :

Salut, je ne sais pas si ça sera utile (pour toi ou pour nous), mais je veux bien essayer de t’éclairer.

Maintenant, je pense que, avec tout le respect que je te dois, que la « science » que tu étudies, est quant même basée sur pas mal de préjugés hérités des sociétés post-modernes aux fondements judéo-chrétiens.

Mais bref, que veux-tu savoir de plus que ce qui est écrit noir sur blanc sur ce forum ?

Nota : J’ai décidé de poster ce message sous mon nom et prénom car je suis fatigué d’usurper le nom d’un dieu, ou d’autre chose. Je suis celui que je suis, et tant que les miens ou moi-même ne m’auront pas rebaptisé, je garderai ce patronyme./



/Ce texte, comme tout texte, hors chôra authentique, pour accueillir nos métamorphoses.




/« L a écrit :

Bon, ben, ça ne marche pas, mon texte pour Nioques, hein? L

« Q. a écrit :

si !!
mais j'ai été absorbée par une phase de boulot juste après

alors si je me souviens bien, on s'est dit que c'était bien que tu aies 3 mois (jusqu'en mai) pour reprendre un peu le texte, et peut-être développer toute l'histoire des odinistes qui nous plaît bien (chacun ses faiblesses)...

à bientôt donc,

n

« L. a écrit :

Le comité de lecture de Nioques veut être odiniste ?

Pour le site Les fils d’Odin, cliquez sur l’url : http://www.lesfilsdodin.com/accueil.htm

Mon étude sociologique sur les païens identitaires provient de cette source et il a été écrit par un sociologue suisse, David Gerber, dans une présentation sommaire d’une science, l’herméneutique objective, que l’on peut trouver sur Internet.


On peut voir, sur le site
Les fils d’Odin, une pétition sur l’ajout au programme des collèges de l’étude de la civilisation nordique à signer et faire signer ici : http://www.mesopinions.com/detail-petition.php?ID_PETITION=7d309e632abc46c3ac3363ce2e80e945

Vous voulez que je les contacte ?

Bien à vous, viens à bout.

L. »

« Q. a dit :

surtout pas

à bientôt





Aucun commentaire: