Eraserhead, David Lynch
dimanche 28 décembre 2014
mardi 9 septembre 2014
The Black List 2
T H E B L A C K L I S T 2
La revue THE BLACK
LIST est réalisée par Bruno Lemoine, François Dominique et l’atelier Tout Va
Bien
Avec Lionel Frondeville, The church of the subgenius, Bruno
Lemoine, Jean-Pierre Le Goff, Rémy Schulz, Frédéric Boilet, François Dominique,
arT erroriste, Paule Sidonie Olympe Lanternier, Genesis Breyer P-Orridge,
Samuel Minne, Daniel Arsseniev, Liliane Giraudon, Valère Novarina, Garance
Clavel, Yves Adrien, Chloé Silbano, Tout Va Bien…
The Black List accueille, dans sa revue, des poètes et des artistes qui n’ont pas oublié
que les listes noires peuvent revenir en Europe et qui n’attendent pas d’y être
pour se signaler comme voulant en faire partie.
The Black List est donc une sorte de liste noire avant la mise en place d’un comité de
censure : une liste noire par anticipation.
On peut
considérer The Black List comme une nouvelle forme de
contre-inquisition sans religion ni chef ou bien comme une simple revue ;
en ce sens, nous estimons qu’une nouvelle forme d’esthétique serait possible
actuellement. Mais comme il est avéré que toute avant-garde est par avance
périmée, The Black List se fixe pour
tâche la quête de l’Impossible.
Prix : 17 euros
70 pages
Pour commander The Black List 2
Adressez-vous à
l’association L’homme approximatif, chez
M. Bruno Lemoine, 35, rue de Talant, 21000 Dijon
h.approximatif@live.fr Tél : 06 13 17 06 93
L'homme approximatif
François Dominique, Bruno Lemoine
& Cie :
Paul Lapaiche… Jean-Pierre
Le Goff… Cécile Mainardi… Jacques Maitre... David Burty… Saïd
Nourine… Éric Cassar… Aurélie
Gérardin… Christophe Esnault… Jean-Luc
Bourdon… Céline Faure… John Gelder… Bruno
Lemoine… Noëlle Audejean… Andreas Gyöngyösi…
« L’homme approximatif »
![]() | ||||
Livre & film DVD réalisé par Isabelle Filleul de Brohy
Editions Al Dante
En poésie comme en tout pays, qu’ils soient réelles ou imaginaires,
en marge des groupes et des courants s’élèvent des voix singulières,
solitaires, inadaptées car se modulant hors les partitions imposées, ne
pouvant se construire à partir des codes autorisés, refusant de se
réfléchir à l’aune des gloires éditoriales et autres reconnaissances
institutionnelles et commerciales. Dans ce collectif imaginé et organisé
par François Dominique et Bruno Lemoine (eux-mêmes poètes), quelques
singularités poétiques actuelles croisent et joutent en sympathie avec
d’autres du siècle dernier, que la critique savante appellent « les
dédaigné-e-s et les oublié-e-s ».
Ce livre est
un projet sans autorité, situé du côté de la révolte contre toute forme
de servitude, mais aussi un acte a-topique dont la fragilité,
l’improbable, l’inachèvement ne le situent en aucun lieu repéré par les
vigies de la « modernité ». Nous sommes « à côté de la plaque », comme
disent les censeurs des bonnes manières littéraires. (François Dominique)
Je parle de qui parle je suis seul
Je ne suis qu’un petit bruit j’ai plusieurs bruits en moi
Un bruit glacé froissé au carrefour jeté sur le trottoir humide
Aux pieds des hommes pressés courant avec leurs morts
écrivait
Tristan Tzara dans son poème L’Homme approximatif, sous lequel cette
aventure éditoriale se place en bienveillante tutelle.
http://al-dante.org/poesie/n-leroy-cyrano-de-bergrac/ |
samedi 31 mai 2014
"L'homme approximatif"
François Dominique, Bruno Lemoine
& Cie :
Paul Lapaiche… Jean-Pierre
Le Goff… Cécile Mainardi… Jacques Maitre... David Burty… Saïd
Nourine… Éric Cassar… Aurélie
Gérardin… Christophe Esnault… Jean-Luc
Bourdon… Céline Faure… John Gelder… Bruno
Lemoine… Noëlle Audejean… Andreas Gyöngyösi…
« L’homme approximatif »
Livre & film DVD
Parution : septembre 2014
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« L’homme approximatif »
Bon de souscription : 20 euros.
Livre in 8° de 118 pages, avec photo de Bernard
Plossu. Documents en quadrichromie proposés par les auteurs. DVD réalisé par
Isabelle Filleul de Brohy, inséré dans l'ouvrage.
NOM :
___________________ Prénom
___________________________
Société/Institution :
_____________________________
Adresse :
_______________________________________________________
_______________________________________________________________
Souscription
pour ___________________ livre(s)-DVD
Envoi
d’un chèque de _______________________ euros
Envoi à Association L’homme
approximatif, Chez Monsieur Bruno Lemoine, au 2, impasse Tabourot-des-Accords,
21000 Dijon. Mail : h.approximatif@live.fr. Tél. 06 13 17 06 93
mardi 6 mai 2014
À la main du diable
À la main du diable, Arnaud Labelle-Rojoux
Centre Pompidou, Paris, "Le surréalisme et l'objet" (30 octobre 2013 - 3 mars 2014)
Ici, le dernier texte, que j'ai écrit, il y a quelques mois, pour un essai intitulé maintenant...
La souillure et le diable... où il est question de l'artiste et écrivain Arnaud Labelle-Rojoux, du diable aujourd'hui, des artistes Eric Madeleine et Chloé Silbano... et du cynisme de Diogène de Sinope, en poésie, en art, mais aussi pour ce qu'il en est de l'argent. -- Se rappeler, ici, que, à Athènes, Diogène le cynique se moquait de l'argent et qu'il prônait l'usage d'osselets, ce jeu des enfants, pour les échanges monétaires. Au fond, Diogène se moquait de toutes les formes d'échange entre hommes, de la parole, des contrats (financiers ou littéraires) ou de la poésie. Il y aurait une anti-sociologie de la communication à écrire, à partir de l'attitude des philosophes cyniques de l'Antiquité, ce qu'on nommait en Grèce le ponos, le ponos cynique... Façon aussi de me moquer de moi, de la poésie lyrique et formaliste, et du poète Christian Prigent, comme vous verrez. Donc, je m'emploie à une forme de recherche nouvelle depuis quelques années maintenant... et que je définirai comme cela, pour le moment (et pour ce moment seulement) : que pourrait-être aujourd'hui une énonciation cynique... qu'est-ce que serait la production d'un énoncé cynique ? (Je m'empresse de remettre cette question à plus tard... et de la colle sur mes lèvres, comme Charles Maturin, l'écrivain du célèbre Melmoth... je ne vous ennuierai plus, promis...)
Se payer la tête
Dans Rien
n’est sacré, tout peut se dire, Raoul Vaneigem écrit au sujet de la
moquerie et de l’insulte : « Il convient de distinguer entre, d’une
part, la moquerie, le quolibet, le persiflage, la raillerie, voire l’insulte,
adressés à une personne, à un groupe, à des idées, au gré d’un esprit ludique
dont la cruauté reste essentiellement formelle et, d’autre part, la brimade
infligée à un individu ou à une minorité par une communauté excipant de son
nombre et de sa force. »[1]
Il est donc possible qu’il joue au ludion avec votre nom et
votre image, tout est possible avec lui.
Si sa calomnie a un intérêt littéraire ou artistique, sa démarche sera, selon
Vaneigem, juste, sinon les lois de la démocratie prévalent, qui rendent
l’individu souverain, maître de son domaine et de son quant-à-soi. La calomnie
ne serait donc juste que pour l’artiste et l’écrivain, si et seulement si
celle-ci a une valeur esthétique.
Imaginez maintenant que les traits de son visage soient flous, imprécis, imaginez
que sa figure soit ce qui
se dérobe à l’observation ou à une herméneutique, de quelque bord qu’elle soit.
Vous pourriez déceler en lui des caractères humains, il aurait même les apparences d’un homme, mais il ne vous viendrait
à l’esprit aucun mot pour le désigner précisément, un peu comme Gygès, ce Grec
qui, tournant un anneau à son doigt, devenait invisible… sauf que lui n’est pas
invisible, il semble plutôt qu’il n’ait
pas d’âme, pas de face ni de Mana à
garder pour être et demeurer un homme, de sorte qu’il paraît glisser, être imperméable à toute forme de communication
reliant les individus entre eux. Il
n’est, en l’occurrence, ni un ludion ni un sycophante[2],
comme le laisserait entendre la citation de Vaneigem, et, pourtant, il pourrait jouer avec vos noms comme
avec vos âmes, parce qu’il ne connaît
pas de borne au jeu, que la durée d’une partie de jeu ne signifie rien pour
lui : il est le jeu.
Ici, les mots résonnent dans votre tête :
« Il est je », puis « Il est jeu », puis je et jeu se confondent : « Il est je(u). ». » Avec lui, l’identité prend alors une autre
forme, une forme tout entière formelle, semble-t-il, – Je(u) prends… je(u) deviens
une forme –, et qui ne devrait pas sortir du cadre fixé par l’esthétique, si tant est que les limites établies par
cadastre au domaine Littérature et Art ne soient pas poreuses…
Imaginez que je(u) n’aie pas de visage ou,
ce qui revient au même, que mon-ton-son-notre visage soit, à l’heure actuelle,
la somme de tous les visages humains vivants sur Terre ; il est, en l’occurrence, aussi un peu vous, puisque vous-même faites partie de
la somme des visages qu’il possède.
La calomnie ne serait alors plus possible en société, il ne pourrait pas se calomnier lui-même, à moins qu’il ne soit K. demandant à être jugé pour
autocalomnie, dans Le Procès de Kafka[3].
Vous n’auriez donc pas besoin de le rencontrer ni même de le lire, comme c’est
peut-être le cas à l’heure actuelle, puisque vous le connaîtriez intimement,
que vous seriez la même personne que lui ; et vous ne désireriez pas vous
rencontrer dans la rue ni même chez vous, n’est-ce pas ? À moins que vous
ne soyez narcissique ou que vous ne pensiez pas vous connaître suffisamment,
mais, généralement, aucun être humain ne désire voir son double au coin d’une
rue – c’est même le thème de nombreuses nouvelles fantastiques et du Double de Dostoïevski.
Etymologiquement, le diable est le dia-bol (Διάβολος),
soit le contraire du symbole : il est celui qui désunit et divise. En Grèce, un symbole était au
sens propre et originel un tesson de poterie cassé en deux morceaux et partagé entre deux contractants.
Pour liquider le contrat, il fallait faire la preuve de sa qualité de
contractant (ou d'ayant droit) en rapprochant les deux morceaux qui devaient
s'emboîter parfaitement. Le sumbolon était constitué des deux morceaux d'un objet brisé, de
sorte que leur réunion, par un assemblage parfait, constituait une preuve de
leur origine commune et donc un signe de reconnaissance très sûr. Le diable, en tant que Διάβολος, serait
alors celui qui aurait dérobé un bout du tesson cassé pour tromper l’un des
contractants et rompre le contrat. Mais, si je(u) est le diable, si son visage
est flou ou trompeur, comment faire pour le reconnaître et empêcher que l’ordre
symbolique ne soit brisé ? Autrement dit, comment faire pour que le Je lyrique – car c’est
bien de lui dont il parle – jouant
aux mots ne sorte, précisément, du cadre et ne joue avec vos vies ? Et si, comme le pense Vaneigem, le Je lyrique est quelquefois
juste et bon en société, quand il demeure l’apanage d’un auteur ou d’un
artiste, jusqu’à quel point celui, qui ne se reconnaît pas de visage en propre
et se paye de mots, peut-il se payer vos têtes ? Jusqu’à quel point se payer la tête ?
Dépasser
les bornes
Il s’était posé la question après avoir vu
une installation d’Arnaud Labelle-Rojoux, À la main du diable, présenté dans le cadre de l’exposition Le surréalisme et l’objet à Beaubourg,
durant l’hiver 2013. Il était venu
avec la poète Cécile Mainardi, l’artiste Eric Madeleine et Chloé Silbano, une
jeune artiste qui était la compagne d’Eric. Il y a dix ans, Eric Madeleine
avait pour pseudonyme Made in Eric, ou l’homme-objet, et il se servait de son
propre corps comme d’un objet, dans le cadre d’expositions, dans des
galeries ou chez des particuliers. Madeleine avait été ainsi homme-table,
homme-chaise, homme-pied-de-micro ou garage-à-vélo, barrière pour saut
d’obstacles ou caleçon, appareil photo ou sac à dos, puis son propre travail
avait évolué, s’était transformé, comme d’un gant qui aurait été
retourné : ce n’était plus son propre corps qu’il détournait maintenant de
son statut de sujet, ce n’était plus lui, l’objet, mais le corps d’autres
hommes choisis pour leurs métiers ou leurs fonctions sociales. Ainsi, un
hockeyeur était devenu balayeur dans un jardin public, des rugbymen dans une
mêlée s’étaient retrouvés à déplacer un piano à queue à la façon des
déménageurs, ou des pongistes transformés en métronomes pour un pianiste, le
piano à queue changé en table de ping-pong sur laquelle ils jouaient. Eric et lui s’étaient connus quelques années
auparavant. Comme il était écrivain, il lui avait demandé de le représenter
pour une photo de lui sur la quatrième de couverture d’un livre dont il était l’auteur[4] ;
Madeleine avait accepté et ils étaient devenus amis.
À la
main du diable d’Arnaud Labelle-Rojoux était une installation qui se
présentait au visiteur, Centre Georges Pompidou, au bout d’un couloir dont les
murs étaient peints en noir. Une grande main rouge cramoisie d’environ un mètre
cinquante, sur laquelle pendaient des personnages verts glauques : le
personnage biblique de Judith tenait la tête coupée d’Holopherne, une femme nue
à tête de poule observait, méditative, l’un de ses œufs, le cyclope du groupe rock
The Residents pendait à l’un des doigts du diable, un nain habillé en cow-boy
figurant dans un film de David Lynch… Quelque chose d’une vitrine de fête
foraine ou d’une entrée du Passage parisien où Aragon avait écrit Le Paysan de Paris. Jouxtant la main du
diable, la pièce d’à côté lui sembla présenter le cliché d’une chambre de
schizophrène, telle qu’on en trouve dans un film policier américain, ou une
installation de fête foraine dédié à Sade, à Fantomas, à Charles Manson et à
Black Dalhia : des feuilles Canson de couleur sur lesquelles sont collées
des articles de journaux relatant des faits-divers policiers ou des phrases
gribouillées par Labelle-Rojoux comme « Un charcutier qui lit Sade est un
homme de goût »… des photocopies de photocopies sur des panneaux se
présentant comme tableaux et dont le cadre était fait à la mousse expansive, la
sculpture d’un renard rouge présentant la tête d’Holopherne sur un plateau…
cette deuxième partie étant un peu le débarras de la première, pièce morte dont
la porte est cachée par un rideau…
Il avait
fait le voyage de Dijon à Paris spécialement pour voir cette installation et il dormit le soir chez Madeleine à
Romainville. Le lendemain matin, durant le petit déjeuner, il discuta avec Silbano, la compagne de son hôte, à propos de l’un
de ses travaux : quelques-uns des dessins de Silbano avaient été choisis
pour servir de motif à la monnaie locale de Montreuil qui sortirait en 2014 et remplacerait les eurobillets.
Les dessins de Chloé Silbano présentaient
des mains, non des mains monstrueuses comme celle de Labelle-Rojoux à
Beaubourg, mais des mains dans la position de tenir un billet. Ici, l’échange monétaire
était simulé : une main sur un billet, comme un écho immédiat de l’échange
marchand qui aurait lieu bientôt à Montreuil.
La jeune artiste avait peur
que le graphiste, qui avait été choisi par l’association en charge du projet,
ne sape son travail, et des conséquences que cela pourrait avoir pour elle, par
la suite… Il y eut alors, dans son esprit, cette histoire du démon inventant
l’argent pour tenter les hommes et détruire leurs civilisations, et il imagina, en surimpression, sur les
billets de Chloé, la main du diable de Labelle-Rojoux, puis un serpent, une pomme,
un pacte… Une idée lui vint alors et il
la lui exposa : et si la jeune artiste allait demander son avis sur ses
billets à un faussaire devenu expert en faux ? Il avait lui-même quelquefois discuté avec Daniel Arsseniev, un
ex-faussaire français connu dans le milieu du grand banditisme, parce que
« se payer la tête » n’était pas qu’un jeu de mots pour lui et il lui proposa de lui laisser le numéro
de téléphone d’Arsseniev… « se payer la tête » n’est pas qu’un jeu de
mots pour lui et le « jeu est un Autre » de Rimbaud, à son sens, est
tout le contraire d’une poétique faisant du texte littéraire une fin en soi… La
lettre du voyant n’est pas une poétique revendiquant l’autotélie, comme, par
exemple, Pessoa avec ses hétéronymes, Borges avec Pierre Ménard ou la
biographie de Roger Laporte, mais une hétérotélie ; le texte de Rimbaud
fait, au contraire, écho, selon lui, aux travaux poétiques du groupe de l’Athenäum en Allemagne, autour des frères
Schlegel[5].
Il lui expliqua qu’une monnaie devait être difficilement
falsifiable, pour rendre les échanges économiques viables en société – difficilement, car aucune monnaie n’est,
par nature, infalsifiable. Pour se protéger contre le faux et l’usage de faux,
une société devait donc punir sévèrement les faussaires. Or, paradoxalement,
dans nos sociétés démocratiques qui avaient signé après guerre la charte des
droits de l’homme, faire de la fausse monnaie était puni plus sévèrement que
l’usurpation d’identité : l’argent coûtait donc, malheureusement, plus
cher, l’argent avait plus de valeur que l’homme ; il n’y avait même de
démocratie réelle en Europe et aux Etats-Unis que pour l’argent. Ainsi,
actuellement, en ce qui concernait le service des Faux documents en France, Arsseniev
lui avait expliqué qu’il avait été dissous, il y avait deux ans de cela. Il n’y
avait, depuis lors, plus de chasseurs de Gutenberg en France, tandis que les moyens technologiques pour falsifier
des documents étaient chaque année plus
puissants. A ce propos, selon un criminologue, Christophe
Naudin, en 2010, le taux de fraudes avait franchi la barre des 6 % pour les
pièces administratives, ce qui était énorme pour un pays comme la France. Avec
les progrès informatiques, les prix étaient actuellement devenus dérisoires en
matière de faux et d’usages de faux, pour une technique d’impression chaque
année plus performante. Il était donc actuellement de plus en plus aisé pour un
individu de battre monnaie ou de changer d’identité et de plus en plus
difficile à un État de contrôler les fraudes et, avec elles, la destinée
sociale de ses citoyens. Que l’Europe permît à des collectivités ou à des
artistes[6] de
créer des monnaies pouvant se substituer à l’euro n’était donc pas surprenant
et participait indirectement à la dérégulation monétaire en vigueur dans le
monde, depuis Bretton Woods.
Il rêva alors d’un nouvel anneau de Gygès : une communauté
dont les membres pourraient battre monnaie et changer d’identité à leur gré,
une communauté qui aurait accès sur Internet aux matrices pour composer des
faux et ayant les machines et les papiers nécessaires pour le faire. Difficile,
pensa-t-il, que les Etats puissent se
défendre efficacement contre une telle communauté, car, si l’un de ses membres
était arrêté ou liquidé, les autres membres menaçaient de publier immédiatement
leurs sources sur Google. Gygès
serait le nom de cette communauté…
Rentrant par le train à Dijon,
il se mit alors à rire. Se payer la
tête, dépasser les bornes, oui… pas seulement inventer, dans des textes, une histoire à l’artiste
Jubal Brown comme de vandaliser Étant
donnés de Duchamp au musée de Philadelphie, pas seulement prendre la photo
d’Eric Madeleine comme portrait sur la couverture de l’un de ses livres,
demander à une relation de se faire passer pour lui dans une lecture publique,
créer de toute pièce une anecdote à propos du Pandrogyne Genesis Breyer P.
Orridge, de Jean-Baptiste Santerre, ou faire passer un acte de vandalisme
commis par la suffragette canadienne Mary Richardson pour un geste du vandale
Hans-Joachim Bohlmann[7]… Fictionnaliser
la vie et tenter le Kaïros ou le diable. Attraper le diable par la queue et le
Kaïros par sa natte… Pas seulement écrire une nouvelle adaptation du film The Game pour Michael Douglas…
L’hétérotélie, la tentation de l’hétérotélie, il savait quelles conséquences pouvaient avoir
l’ « esthésie du politique » dont parle Jean-Michel Heimonet à
propos du duo Jules Monnerot/Georges Bataille à l’origine du Collège de
sociologie[8]…
Monnerot jouant aux apprenti-sorciers et fasciné par le nazisme s’était laissé
séduire par l’extrême droite après la seconde guerre mondiale ; Bataille, dans
un mouvement inverse, s’enferma dans son expérience intérieure…
*
Dans son essai A quoi bon encore des poètes ? Christian
Prigent mettait déjà en garde contre cela : « Dans les obscurités, la
difficulté, la cruauté de la poésie (dans ses pointages du Mal et dans ses
résistances à la détermination a priori du
Sens) devraient pouvoir s’énoncer allégoriquement quelques motifs du choix
démocratique : plutôt le malaise désillusionné de la démocratie que la
sanglante illusion des grands projets radieux tels qu’autour de nous ils
s’apprêtent, inéluctablement, à se reconstituer. »…
Oui, bien sûr, cher Prigent,
chapelliser la poésie, qu’elle ait bien un goût de ghetto contre toute
tentative de fronde, petite Versailles ayant des studios pour nobles de plume
qui produisent et éditent, mais… voudriez-vous pas faire partie de Gygès, vous aussi ? Si vous vous
laissiez un peu aller à tourner un peu son anneau dans vos phrases ?...
Être un peu plus lyrique, non ? Voulez-vous pas tourner l’anneau à
votre doigt ? Vous écririez la suite de la communauté de Gygès avec lui… Battre monnaie et changer
d’identité à votre guise, finis le spleen et l’ennui pascalien ! Nous
serions quelques-uns à réfléchir à ce que pourrait être une telle communauté et
des moyens pour y parvenir. Est-ce trop demander à l’écrivain que vous
êtes ?...
Chloé Silbano... ou ce qu'il reste, aujourd'hui, des dessins de
Silbano, pour le projet de monnaie locale de Montreuil :
un osselet de Diogène, une prune, un billet, un jeu d'échanges marchands/non marchands.
(À suivre…)
[1] Rien n’est sacré, tout peut se dire, Raoul Vaneigem. Editions La
Découverte, Paris : 2003. P. 66.
[2] Sous cette
appellation, on désignait à Athènes des
personnes qui s’adonnaient à la dénonciation et qui cherchaient par tous les
moyens à provoquer des procès, de manière à mettre en valeur leur habiletés
rhétoriques et à encaisser les récompenses prévues en cas de succès. Ces
délateurs publics devinrent rapidement une plaie du système judiciaire.
[4] Il s’agit de L’après-journal Nijinsky de Bruno
Lemoine publié par les éditions Al dante en 2008.
[5] Dans la revue L’Athenäum de juillet 1798, Friedrich
Schlegel définit la poésie romantique comme «poésie universelle
progressive », faisant ainsi entendre que la poésie est une tâche qui
s’accomplit dans le temps et qui doit pénétrer peu à peu le tout du
monde ; la poésie a pour but de « mêler et de fondre ensemble » (« mischen
und verbinden ») D’ailleurs, le premier aphorisme des Fragments critiques de Friedrich
Schlegel est « (1) Nombre de ceux qu’on appelle des artistes sont à vrai
dire des œuvres d’art de la nature. » (L’absolu
littéraire, théorie du romantisme allemand, Philippe Lacoue-Labarthe et
Jean-Luc Nancy, Seuil, « Poétique », Paris : 1978.) Dire aussi
qu’une relecture des textes des membres de l’Athenäum s’impose aujourd’hui, une
relecture qui serait moins platonicienne et autocentrée qu’elle ne l’a été et ne
l’est encore, une théorie qui aurait le souci de la vie et de cette république
de l’art dont rêvaient l’Athenäum, mais aussi Joseph Beuys, avec la
« sculpture sociale ».
[6] Ainsi, le projet Art
Money, au Danemark, en 2013, initié par l’artiste et écrivain Lars Kraemmer,
permet à des artistes de payer en œuvre d’art leurs achats, dans certains
magasins de Copenhague. Voir www.artmoney.org
[7] Il s’agit du tableau Vénus à son miroir de Velasquez,
vandalisée pour des raisons de lutte féministe par Mary Richardson à la
National Gallery de Londres, en 1914.
[8] « La part maudite du
collège de sociologie », Jean-Michel Heimonet, Négativité et communication, Jean-Michel Place,
« Surfaces », 1990. Dans la revue Acéphale
de Bataille, Monnerot écrit, dans
un article « Dyonisos philosophe » : « Abandonnant
l’esthétique pour l’esthésie, le créateur ne crée pas de l’art, mais de
l’histoire, il ne joue plus une pièce mais une partie dont l’enjeu n’est pas
quelque ciel, mais la terre. »
samedi 3 mai 2014
THE BLACK LIST
Les Riches Douaniers, La parole du crâne, 2011
En attendant le Black List n° 2, je mets en ligne le contre-réquisitoire du procès du poète noir et échevelé Xavier Forneret. The Black List est une forme de contre-inquisition blacklistant des poètes et des artistes. L'acte de foi (ou autodafé) de The Black List est donné ici :
« Messieurs les
officiels commis à la poésie,
Ayant
appris par Le Littéraire l’existence
surprenante
de
votre Comité d’Épuration pour les Lettres,
je
viens vous demander de prendre une sanction
contre
moi. »
Armand Robin, Le Libertaire,
29 novembre 1946
The Black
List accueille, dans sa revue, des poètes et des artistes qui
n’ont pas oublié que les listes noires peuvent revenir en Europe et qui
n’attendent pas d’y être pour se signaler comme voulant en faire partie.
The Black
List est donc une sorte de liste noire avant
la mise en place d’un comité de censure : une liste noire par anticipation.
On peut considérer The Black List comme une nouvelle forme de contre-inquisition sans
religion ni chef ou bien qu’elle est une simple revue et que, en ce sens, elle
croit encore qu’une nouvelle forme d’avant-garde ou d’esthétique est possible
actuellement ; dans l’un ou l’autre cas, ce serait faire fausse route.
The Black
List ressemble davantage à K, l'arpenteur du Château de Kafka, mais à un K qui aurait
compris que le Château n’existe pas et qui arpenterait donc un désert, un plan
lisse sans confins ni limite, comme un lion fait les cent pas dans une
cage ; ce que The Black List
recherche alors : que la porte de la
cage s’ouvre et que le lion vous saute à la gorge.
The Black
List est donc une forme ultime de contorsion
du vivant, un organisme ayant besoin d’une proie et capable de l’attendre des
siècles, dans une position proche de la supination, pour survivre :
The
Black List est une puce.
Le contre-réquisitoire du procès Forneret paru dans le numéro 1 suit ici :
Le poète Xavier Forneret
(1809-1884) a été jugé à contumace par THE BLACK
LIST, le samedi 23 février 2013
à la fondation d’art contemporain Le Consortium à Dijon, pour défaitisme, parasitisme et blasphème.
Durant ce réquisitoire, le poète Xavier Forneret était comparé, de façon
totalement gratuite, au comique américain Andy Kaufman qui, dans les années 70,
provoquait les femmes dans des matchs de catch trafiqués et annonçait sa mort
dans les médias afin que sa cote de
popularité remonte.
Poète
romantique français à peu près inconnu à son époque, Xavier Forneret
(1809-1884) est l'auteur d'une œuvre originale, marquée par le macabre et
l'insolite, publiée à compte d'auteur puis tirée de l'oubli par les
surréalistes, qui considèrent Forneret comme un précurseur de l'écriture automatique.
XAVIER
FORNERET VS ANDY KAUFMAN
Andy
Kaufman, dont le cinéaste Milos Forman avait fait le biopic avec Man on the moon (1999), n’était pas un
comique américain et il ne s’est jamais prétendu comme tel. Dans un article du New York Times, il avait déclaré à ce
propos : « Je ne suis pas un comique, je ne raconte jamais de blagues... La
promesse du comédien, c'est d'arriver à vous faire rire de lui... Ma seule
promesse, c'est d'essayer de divertir du mieux que je peux. Je sais manipuler les réactions des gens. Il y a
différentes sortes de rire. Le rire des tripes, c'est quand vous n'avez pas le
choix, vous êtes obligé de rire. Le rire des tripes ne vient pas de
l'intellect, et c'est beaucoup plus difficile à pratiquer pour moi maintenant
que je suis connu. Ils se disent : "Wow, Andy Kaufman, ce type est
vraiment marrant", mais je n'essaie pas d'être drôle, je veux simplement
jouer avec leur tête. »
Or, pour arriver à se payer la tête du
public, il faut faire ce que jamais un comédien ne ferait : il faut rater
son entrée en scène, mais rater dès les premiers instants sur la scène, dès la
toute première fois sur les planches, et c’est ce que faisait Andy
Kaufman ; le public assistait à un spectacle mauvais et, parce que c’était
mauvais, parce que l’on pouvait se
demander pourquoi le directeur du music hall avait permis à un tel type de
monter sur scène, qu’autre chose se passait : l’on se moquait d’Andy
Kaufman, puis l’on découvrait qu’Andy Kaufman jouait à merveille le très
mauvais comique, mais à peine, dans un
hiatus : il jouait à merveille le très mauvais, donc, à moins que cela
ne fût réellement mauvais ; dans ce cas le public devait rechercher autre
chose, l’on attendait, mais quoi ? Alors, certains, mécontents d’avoir
payé pour ça, sifflaient Andy, mais Andy ne se laissait pas faire : c’est
lui qui était sur scène et pas eux. Alors Andy lisait, il lisait le roman de
Fitzgerald The great Gatsby, mais
jusqu’au bout, même s’il n’y avait plus un seul spectateur dans la salle.
Et voilà une différence essentielle entre
un auteur et un comédien, un artiste ou un écrivain : un auteur ne joue pas d’abord pour le public, mais pour lui.
En France, le premier à s’être payé la tête
du public et du lecteur se nomme Xavier Forneret ; c’est un poète échevelé
de la fin du dix-neuvième siècle qui habitait Dijon et qui est aujourd’hui
parfaitement oublié, alors que les surréalistes, au vingtième siècle, le
considéraient comme leur père. Pourquoi cela ? Pourquoi Xavier Forneret,
le père du surréalisme, est aujourd’hui parfaitement oublié ?
Parce que Forneret n’avait pas peur
d’écrire de la
MERD(R)E
dans
des textes ou pour le théâtre, comme Andy Kaufman l’a fait sur les planches ou
lors de match de catch avec des femmes. Or, aujourd’hui, les Presses du Réél
publient l’anthologie Xavier Forneret, et c’est très bien, c’est très bien de
vouloir publier la première vraie
MERD(R)E
de
l’histoire de la poésie contemporaine, et nous espérons, quant à nous, que
cette anthologie Forneret n’aura pas de lecteur, parce que ce serait vraiment
un comble que le premier à s’être foutu de la tête du lecteur en ait un
maintenant.
Comme l’écrivait le poète Julien Blaine à
la fin d’un très mauvais livre dont j’ose à peine citer le nom ; il s’agit
de Cours minimal sur la poésie
contemporaine publié aux éditions al dante en 2009… comme l’écrivait le
poète marseillais Blaine, donc :
« Je vous emmerde tous
et je continuerai à gagner mes procès et à tous vous faire chier pour dresser
un jour l’immense monument en hommage à la gloire et à la fusion des estrons.
Je suis un artiste d’une
autre sorte : un artiste nouveau qui n’est pas encore sur le marché, un
artiste que vous serez obligé d’étudier tout au long du troisième
millénaire : le Maudit Arrogant et Triomphant (M.A.T.) »
Pourquoi, me direz-vous, pourquoi Xavier
Forneret ou un Maudit Arrogant et Triomphant, ou M.A.T., comme le poète Julien
Blaine se désigne lui-même, pourquoi un M.A.T. devrait-il faire de la
MER(D)RE ?
Pourquoi la poésie contemporaine se
force-t-elle à ce point sur le pot de chambre ?
C’est exactement la question que se posait
déjà André Breton à propos de Forneret, dans son Anthologie de l’humour noir :
« D’où vient que
l’auteur d’une vingtaine d’ouvrages aussi singuliers soit passé presque
complètement inaperçu ; comment s’explique l’extrême inégalité de sa
production, où la trouvaille la plus authentique voisine avec la pire redite,
où le sublime le dispute au niais, l’originalité constante de l’expression ne
laissant pas de découvrir fréquemment l’indigence de la pensée ; qui fut
cet homme dont tout le comportement extérieur semble avoir eu pour objet
d’attirer l’attention de la foule, que sa manière d’écrire ne pouvait manquer
de lui aliéner, cet homme assez orgueilleux pour faire passer dans les journaux
cette annonce d’un de ses livres : « Le nouvel ouvrage de M. Xavier
Forneret n’est envoyé qu’aux personnes qui envoient leur nom à l’imprimeur, M.
Duverger, rue Verneuil, et après examen de leur demande par l’auteur » et
assez humble pour, à la fin de ses ouvrages, demander l’indulgence du
public ? »
Pourquoi alors ?
Mais parce que Forneret était un M.A.T.,
Un Maudit Arrogant et Triomphant,
parce que la situation de la poésie à son
époque, qui est celle où Mallarmé écrivait, était très mauvaise, puisqu’il n’y
avait plus, mais plus du tout de lecteur, ou très peu, pour les poètes, et,
aujourd’hui encore, la situation de la poésie reste détestable, alors que –
fait nouveau –, tout le monde cherche à en écrire.
Et pourquoi cela ? Pourquoi la poésie
n’a plus de lecteur ? Parce que la poésie, à l’époque de Mallarmé et
Forneret, découvre les Védas et les humanités indiennes, alors que le lectorat,
en Occident, en est encore au miracle grec et chrétien, les poètes découvrent
le style nébuleux de la poétique indienne, et, pour un lecteur en Occident, le
style nébuleux, c’est de l’onanisme intellectuel, c’est de la branlette, de la
diarrhée verbale, voilà ! Faites l’expérience avec vos amis, si vous êtes poète,
faites leur lire les poèmes d’un yogi tantra de quelque époque que ce soit
jusqu’à nos jours, en disant qu’ils sont de votre main, et ils vous répondront
que vous êtes un branleur ! Et cela ira de mal en pis au vingtième et
vingt-et-unième siècle, avec les apports de l’anthropologie : l’on
découvrira le miracle dogon, le miracle indien, le miracle samos, le miracle
pygmée, le miracle cambodgien, le miracle khmer, et tout, tout autre miracle à
votre convenance ; et le miracle grec et chrétien, les humanités grecques
et chrétiennes paraîtront totalement étriquées aux poètes, sauf au public et à
l’Université française qui se feront un sport de ne rien comprendre et de
stigmatiser la poésie contemporaine.
Le poète, à partir de Mallarmé, est un
humaniste planétaire, celui qui relie l’Orient à l’Occident, alors que le
public en est encore à Cicéron et à Aristote. Donc, c’est un Maudit Arrogant et
Triomphant et il devra l’accepter et accepter de faire des estrons ou
ME(R)DRE.
Or,
pour être un M.A.T., il faut
rater son entrée en page comme on rate son entrée en scène.
Un auteur, contrairement à un comédien ou à
un écrivain, s’autorise à, puisqu’il s’intéresse davantage au geste libre et
gratuit. Il se paye donc la tête du lecteur ou du public, comme Forneret, puis
Kaufman l’ont fait.
C’est pourquoi vous avez dû, pour
participer aujourd’hui à la première Black
List consacrée au poète Xavier Forneret, avoir été trié sur le volet pour
venir à la rotonde du Consortium, comme Forneret s’est réservé le droit de
vendre ou non l’un de ses livres aux lecteurs qui le désiraient. C’est pourquoi
aussi nous avons fermé les portes de la rotonde où vous êtes, comme Hitchcock
l’avait fait, en 1960 aux Etats-Unis, pour toutes les salles de cinéma US, durant
la projection de son film Psychose...
Et, maintenant, nous allons lire Gatsby le magnifique de Fitzgerald en anglais, comme le faisait
Andy Kaufman lui-même lorsque le public le faisait chier, et nous ne rouvrirons
les portes que lorsque le livre sera terminé…
(En babillé)
Kohunakayoa
palainyanokoyiyalainakayura
halayoninhirakayainyiyakatodoinna
payanapoyanaekiyalaluwannakaycraraynakiyala.
Haloyenapapayenakiyalionoyanapayera…
Bruno Lemoine
Lu à la fondation d’art contemporain Le
Consortium à Dijon, en février 2013, pour la sortie des Œuvres complètes de
Xavier Forneret aux Presses du Réel de Dijon.
Le prochain poète blacklisté sera le banalyste Jean-Pierre Le Goff.
Le prochain poète blacklisté sera le banalyste Jean-Pierre Le Goff.
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