(Blanc -)
…
( Et, pendant ce temps-là,
mère prie toujours.
Il semble que, comme
une vestale, elle ait à veiller sur le feu de nos âmes,
sans quoi nos cités
seraient maudites.
N’a-t-elle jamais
pensé que le sort des hommes se déroulait sans elle ?
N’a-t-elle pas, une
seule fois, dans le cours de son existence,
considéré quelque chose
comme une théorie et Dieu, comme une théorie ?
Si tel est le cas,
c’est qu’elle n’a pas assez veillé ni assez prié.
Ne voit-elle pas, dans
les journaux, à la télé, les guerres perpétrées chaque jour,
les violences commises
et l’innocence bafouée ?
C’est qu’elle est
peut-être la seule,
elle est probablement
la dernière à prier comme elle le fait ;
sa prière n’atteint donc
plus, comme jadis, les empyrées.
Elle n’a peut-être pas
assez fort invoqué le nom du Très-Haut
ou la salive lui a
manqué,
ou elle s’est endormie,
elle aussi, dans le jardin des oliviers.
Pourtant elle s’était
promise de rester vive
à la dernière heure du
Christ,
elle ne pouvait
imaginer que le sommeil
la surprendrait avant l’arrestation du plus saint des hommes.
Comment aurait-elle pu
croire un seul instant,
un seul petit moment, une
seule et unique seconde,
s’assoupir ?
Elle reprend alors,
aux aurores, son chapelet,
contrite,
et égrène à nouveau
les heures,
pour vous, vous qui
l’ignorez ici bas.
L’idiotie serait d’en
rire, en se figurant tel comportement sorti d’un autre âge ;
l’idiotie serait de
s’en moquer,
alors que nous
envoyons des satellites aux nues
et nous mettons à
genoux sous les cours des Bourses.
L’idiotie serait de ne
pas voir ce qui nous lie à elle,
en nous forçant à
prier des dieux que nous haïssons,
comme elle. )
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