dimanche 28 février 2010

Protée (8)


Peu à peu la mémoire du passé surgit, et les méfaits et les crimes de tes ancêtres apparaissent au grand jour. Les études récentes sur la préhistoire t’apprennent que tes pères ont probablement tué, dans des guerres intestines, tes frères, les hommes de Neandertal, au front bas et à la démarche inclinée au sol, et que ces guerres ont été oubliées des générations qui les ont suivis. Alors, tu ressens, à nouveau, l'angoisse de la mort et le goût pour la violence et le meurtre de tes différents avatars.

Dans ton esprit se poursuit un lent travail de mémoire, commencé avec tes maîtres sur les bancs d'école, et dans laquelle l’histoire ouvre les portes d’univers inconnus des érudits et des savants des siècles précédents. Avec l’ouverture de telles portes, une connaissance nouvelle du mal et de la cruauté t’est révélée, à laquelle même le divin marquis n’aurait pu rêver, ni méditer Bouddha.



Lent travail de mémoire, si la mémoire de l’histoire est le décompte des morts à travers les décades, penses-tu. Mais la quête du Protée n’est pas encore celle-ci, puisque tel dieu réside hors du rythme des saisons et de la loi biologique, en deçà et au-delà de la contemplation du vivant et de son passé.


Lent travail de mémoire, épreuve, anamnèse, décompte des morts à méditer jusqu’à l’oubli. − Corps brut, chair brute, désir brut, le Protée ! Larve ou œuf philosophique, selon tes conceptions en matière de métaphysique, mais une larve et un œuf qui n’ouvriraient que sur des corps en fusion.


Admettre son existence, c’est nier la tienne.






5 commentaires:

Anonyme a dit…

J’oublie son existence, quand il se manifeste parfois, je feins de l’ignorer, je le martyrise, je l’accepte, je le combats et le dompte, je me révolte, ennemi ou ami, ses abîmes me séduisent.
Un bébé dans les bras, hier, observant ses yeux bleu nuit et ses pupilles se dilater à chaque mouvement de formes informes devant lui, son regard fasciné était le mien découvrant et écoutant le brouhaha du monde en éveil. Contenu, serein et pourtant étranger, porté par Protée, ce monde sera le sien se dit-il confiant où, rompant ses amarres, il devra reconnaître ensuite ses ancêtres farouches si lointains.

Lemoine a dit…

Bon... Je vais jouer au jeu du Who is who. Alors, je dis : "L'Anonyme est une jeune femme, type, 25-30 ans, qui habite Dijon et qui écrit." ? Et là, elle me répond : "Raté ! T'es trop nul, faut qu't'arrêtes de lire le magazine Psychologie..."

Anonyme a dit…

ahahahah...moins jeune que ça ! Même si les mots me parlent, je n'écris pas sauf quand on me le demande. J'habite Dijon et on s'est déjà croisé...

Lemoine a dit…

Bon... alors, C ki ?

Sandrine a dit…

Je pense que mon prénom, le plus neutre des indices, te dira quelque chose…à++